LES
ENFANTS ET LE COSMOS
Les ours c’est plus fort ou moins fort que
les hommes ?
Le pacifique il est plus grand que notre mer ?
Ca passe vite le temps.
Un ferry ça peut écraser un ours ?
L’homme avec un fusil il est plus fort que l’ours, pas vrai ?
Nous on est sur une grosse boule géante. La lune elle va très vite
mais le soleil bouge pas.
Lundi
06 octobre 2003 : 490 km.
GMTFr : -9H 51° nord / 127° ouest météo :
déluge et pluie
Une
mauvaise journée ça commence toujours mal. Le déluge
de pluie a commencé dans la nuit. Le sewer (notre vidange
d’égout) sort de son trou et se répand, odeurs
et vues garanties. Ensuite partir du cul du loup de l’île
pour rejoindre le cul de l’ours de l’île. 150
kilomètres de virages genre rallye de Monté-Carlo
en RV sous une pluie battante, déjeuner dans le plus mauvais
Chinois de Port Alberni, autant dire du monde… encore 70
km sous la pluie dans les virages, 100 km d’autoroute pas
trop mauvaise, 80 km derrière un poids lourd, encore 90
km sous la pluie et 5 km de piste défoncée par
les log trucks (camions à bois). Voilà comment
faire 495 km sur une île de 450 km de long. L’horreur.
Et bien, grâce aux cascades spontanées qui dégringolent
de la montagne de tous les côtés, à l’inoubliable
forêt (très mouillée) pour les amoureux de
Cathedral Cove, aux énormes camions de bois (il y en avait
un rempli avec seulement 4 troncs ! TEVDJB), aux magnifiques
forêts canadiennes, au bout de bout du monde qu’est
Telegraph Cove, à l’espoir de voir des orques après-demain,
c’était une bonne journée.
La phrase
du jour : "C’était
un petit chien blanc avec des oreilles comme les 101 dalmatiens
et des pattes normales et le poil long comme ça (en tirant
sur son pull)" Félix.
Mardi
07 octobre 2003 : une transition bien remplie.
GMTFr : -9H 51° nord / 127° ouest météo :
nuageux
Telegraph
Cove. On se demande pourquoi cette minuscule crique avec baraques
de pêcheurs est indiquée sur la carte. Nous reviendrons
demain, mais Choupie, toujours un peu claustrophobe, trouve l’endroit
un peu encaissé. C’est vrai. Une journée à tirer
dans la région en attendant le bateau de demain pour aller
tenter de voir des orques (killer whales, c’est bon pour
le business, ou orcas).
Direction Port Mc Neil. Premier arrêt, l’énorme
exploitation de bois avec machines démesurées, troncs
qui flottent sur l’eau et bulldozers qui poussent des collines
de sciure (TEVDJB). Comme dans les documentaires sur le Canada.
Sur le port, excellent petit déjeuner du « logger » (bûcheron,
TEVDJB) et ferry vers Albert Bay, minuscule île en face,
dont nous n’avions jamais entendu parler jusqu’à il
y a une heure.
Albert Bay c’est un peu l’île Ste Marguerite
(Iles de Lérins - Cote d’Azur - France) en un peu
plus grand avec des voitures et une seule route de 2 km. Nous entreprenons
donc un tour de l’île exhaustif. Albert Bay possède
tout de même une belle forêt ancienne dans un marais,
avec « des arbres de sorcières », où nous
réussissons à nous perdre. Elle possède aussi
un magnifique musée d’art Indien, avec les plus beaux
masques que nous ayons vus depuis notre arrivée. En fait
les premiers beaux masques, ainsi qu’une collection de vannerie
superbe. Cela nous réconcilie avec l’art Indien qui
pour l’instant ne nous avait pas convaincu. Mais il est vrai
que les Kwakwa’wak (TEVDJB), sont de grands artistes. Juste
le temps de prendre le ferry de 15H pour faire l’école
et croiser les enfants d’Albert Bay qui prennent le même
bateau dans l’autre sens pour rentrer chez eux après
l’école. Chacun son chemin.
Comme nous n’avons pas fait de route aujourd’hui et
qu’il nous reste du temps, petite expédition vers
un autre des bouts de l’île, Port Alice. Très
belle route, qui nous semblerait extraordinaire sans trois semaines
de Canada dans les roues du RV. Mais si les hommes ne changent
pas, nous trouvons quand même cela beau et Port Alice très
mignon. Assez contents de notre coup « nous ne serons pas
venus jusqu’ici sans aller au bout », quelques kilomètres
après Port Alice, (car après le bout du monde il
y a encore quelques chose un peu plus loin), nous faisons demi-tour
cool. Trop cool, sans sortir du RV pour voir ce qui se passe. Et
nous voilà coincés. Les quatre roues arrières
sont embourbées dans le mou du bord de la route à quelques
mètres nième panneau « soft shoulders ».
Il faut se méfier des « soft shoulders ». Impossible
de bouger le RV qui est parfaitement perpendiculaire à la
route, la partie arrière dans la pente, carrément
penché vers l’arrière, la partie avant qui
bloque tout notre côté de la route. Aucune voiture
ne passe, Choupie et Chris font la « circulation »,
mot assez mal approprié cet endroit désert. Premier
4X4, premier arrêt, premier avis. Il faut un « tow
truck ». Choupie part à Port Alice organiser ça.
Au moins une heure pour que le gars arrive de Port Mc Neil ou Port
Hardy, car pas de tow truck ici. Chris reste sur place au cas où.
Deuxième 4X4, ils n’ont que des 4X4 au bout du monde
et on les comprend… même avis. Troisième 4X4, énorme
et rouge, c’est un 6X6. Un 4X4 de sérieux quoi, avec
4 roues motrices à l’arrière (et 2 à l’avant
pour faire 6 !). Les gars aussi sont des sérieux. Le chef,
celui qui conduit, dit qu’il va nous sortir de là.
Vous avez remarqué que les chefs conduisent toujours « au
début », puis ensuite, embourgeoisement aidant, ils
ne conduisent plus jamais ? Il a l’air sûr de son coup.
Mais comme il lui manque une bonne chaîne pour nous tirer
de là, il va aller en chercher une. “Back in less
than 10 minutes”. Effectivement, 8 minutes plus tard, les
trois gars sont de retour. Chacun avec son véhicule. Maud
avec les enfants en lieu sûr, chaîne sous le RV, on
part dans le sens dans lequel nous sommes rentrés, un deux
trois, c’est fini nous sommes dehors. Les deux gars « en
plus » ont fait la circulation pendant ce temps. Yahoo, Bravo
le Canada. Tout ça avec beaucoup de gentillesse et pas de
condescendance ou de leçon à donner à des
touristes… juste pour aider des gens qui en ont besoin. Chapeau
! Ca fait longtemps que ça n’est plus comme ça
chez nous. Et chez nous, c’est nous… Le temps d’aller
faire demi-tour 500 mètres plus loin sur une grande étendue
en gravier et tout le monde a disparu. Reste un seul gars qui accepte
quand même quelques dollars et n’en revient pas. Le
6X6 rouge m’attend en ville pour m’amener jusqu’à Choupie
qu’il a déjà prévenue d’annuler
le tow truck. Mais comment savait-il qu’elle était
là ? Renseignements pris, c’est le seul téléphone
accessible de Port Alice… Le bout du monde ça simplifie
certaines choses.
La phrase du
jour : "Papa,
c’est où le bout du monde ?" Julia
(en regardant la carte).