Journal de bord
ILE DE PAQUES
Février 2004

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UN PEU DE TECHNIQUE

Légendes :

Les pierres des statues auraient été importées de terres lointaines autant que mystérieuses, transportées avec l’aide d’extraterrestres déjà en contact avec les Incas, Incas téléportés sur l’île pour apprendre la taille des dites pierres aux Rapa Nuis.
Faits :
On a dénombré un millier de moais environ sur l’île. Ils mesurent de deux à vingt mètres. Ils pèsent de 10 à 200 tonnes.
Matériaux :
Sur l’île, on trouve deux carrières, toutes les deux de lave. Une très grande, Rano Raraku, de tuf noir, dont on extrait tous les corps et têtes de moais. Une petite, Pana Pau, de scorie rouge, dont on extrait les coiffes.
Sculpture :
Tailler directement dans la lave, le moai « allongé » sur le dos, face vers le ciel. Utiliser des outils en pierre plus dure que le tuf qui est lui-même relativement léger et surtout peu compact. Pendant la taille, pour renforcer la statue et éviter toute rupture, laisser une arrête dorsale épaisse le long du dos, une quille.
Certains seront abandonnés quand, malgré l’inspection préliminaire de la roche, il s’avèrera en cours de travail que le bloc choisi contient trop de défauts. Une fois la taille de la face avant et des côtés terminée, faire des trous dans la quille et remplir ces trous avec des pierres résistantes. Quand la quille ne consiste plus qu’en plus quelques piliers qui soutiennent le moai, les casser pour qu’il ne repose plus que sur le lit de pierres. Le voilà détaché du cratère. On peut alors enlever pratiquement toutes les pierres sur lesquelles il repose.
Très spectaculaire mais pas photogénique, un moai terminé qui ne repose que sur trois ou quatre pierres, une sous la nuque, une sous le dos, une ou deux sous les reins et le bas. Presque en apesanteur de trente ou quarante tonnes. Et facile à faire glisser là où on le désire.
Pour la coiffe, procéder de la même façon. En plus facile car la coiffe s’inscrit dans un cylindrique. Pour ne rencontrer aucune difficulté, tailler le cylindre horizontalement et le détacher avec la méthodes des piliers.
Transport :
Attention à ne pas tout gâcher pendant le transport, ce serait dommage, bien que décoratif sur l’île… On peut transporter le moai sur un chariot, comme les Egyptiens. Il faut être beaucoup et pas pressés. On peut aussi le faire rouler sur de gros rondins de bois dur. Une solution plus élaborée consisterait à faire rouler le chariot sur les rondins de bois, mais on n’est pas obligé de compliquer la recette. Une dernière option, recommandée par certains auteurs, est un portique qui permet de faire glisser le moai de proche en proche. Toutes ces solutions donnent de bons résultats. (On a réussi à bouger un moai de plusieurs centaines de mètres en quelques heures avec le système des rondins par exemple).
Transport couché ou debout ? Tout est possible, rien n’est certain. Mais couché, les anciens préféraient transporter face vers la terre. Attention, la réussite de l’opération dépend de la bonne préparation du chemin jusqu’au site. Une équipe spéciale, différente de celle des artistes, sera dédiée à chaque tâche, construction du chemin et transport.
Relever la statue :
Une fois sur site, il faut relever le moai, s’il n’a pas été transporté debout. Rien de plus simple. Faire un monticule de terre meuble, pousser le moai dessus, creuser la terre sous sa partie inférieure, la statue aura tendance à basculer, la tête à se redresser. Assurer ses arrières en introduisant des pierres derrière la tête et recommencer. Bientôt vous introduirait des pierres derrière sa nuque, son dos… jusqu’à ce que l’œuvre soit droite, dans le trou creusé devant sous elle. Le poids de la pierre n’entre en rien dans l’effort à produire, seule la qualité du sol à creuser mesure l’effort. Il suffit alors d’enlever la terre à l’avant du trou pour libérer la statue. Debout et sans gros moyens.
Pour le transport de la coiffe, rien de plus simple. La tailler trop grande et la faire rouler jusqu’au site. Si les calculs d’érosion et de frottement sont bien faits, elle aura atteint la bonne taille après transport. On peut aussi la tailler encore plus grande et récupérer sur site les morceaux de scorie laissés par la deuxième taille, pour construire les bordures rouges des sites les plus nobles.
Ne pas oublier de placer le moai face au village, dos à la mer, sauf pour les sept éclaireurs ancestraux qui ont découvert l’île, qui eux doivent regarder la mer, vers les Marquises, leur patrie d’origine.
Positionner la coiffe sur la tête du moai :
On peut positionner la coiffe en position allongée, il faut alors bien l’arrimer pour qu’elle ne pose pas de problème lors du relevé de statue. On peut aussi la mettre sur la statue déjà debout en construisant une petite pente jusqu’au niveau du crane.
Le contraste entre le moai noir et la coiffe rouge, qui rappelle les coiffures en chignon teintée de terre rouge de la noblesse de l’île, est du meilleur effet.
Finitions :
La préparation est presque prête, ne reste plus que la présentation. Finir de tailler les orbites, siège de la mana (pouvoir), qui ne saurait investir le moai tant qu’il n’a pas acquis sa dignité, debout. Encastrer les yeux de corail blanc et les pupilles de couleur. Faire venir le sorcier pour qu’il fasse son ouvrage, sinon vous aurez des ennuis.
Conseils :
Les accidents sont nombreux. Seule la pratique quotidienne permet d’éviter tous les écueils techniques pour parvenir enfin à exprimer le style propre de chaque tailleur qui évolue selon les époques mais aussi selon les artistes et les personnages représentés.
Tout cela prends beaucoup de temps, certes. Mais comme il n’y a pas la télé, que la première terre, incertaine et pas forcément amie, est à plus de 4000 km et qu’il faut bien trouver des occupations pour une population débordante en nombre et en énergie, au final, cela devient une activité phare, largement promue par les chefs qui conquièrent ainsi un bout d’immortalité îlienne et consolident en même temps leur pouvoir séculier...
Etre nombreux, se partager le travail, prendre le temps qu’il faut, voilà les recettes de la réussite.
Si vos ennemis sont battus, renverser leurs moais. Aucune technique particulière à retenir, tout est bon (ou plutôt mauvais), pour exécuter cette besogne vers le bas.
Conclusion :
Voilà, le parfait kit du tailleur de moais. Il n’y a plus qu’à trouver une grosse pierre et une place dans le garage pour commencer. De quoi détruire bien des légendes. Mais le tour du monde n’est-il pas une vaste entreprise de démystification ? Heureusement, il y a le génie et le talent des hommes qui taillent.

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