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Jeudi
06 novembre 2003 : ISABELA Punta Morena, Puerto Fregata.
Le festival.
GMTFr : -7H 0° sud 91° ouest météo : beau,
force 2 à 3, mer belle
Départ
5H05. Sortie de la baie sous l’œil aiguisé du capitaine.
Toujours l’ambiance départ du port dans la nuit avant
le jour. On quitte la terre pour aller ailleurs. Le bateau roule
dans une mer molle pendant une heure. Choupie se réveille,
puis les enfant vers 6H30. Tout le monde a passé une bonne
nuit réparatrice. Maud dort encore. Otaries, frégates,
pailles en queue… vers 7 heures, les baleines promises sont
au rendez-vous. Ce sont des rorquals communs, il y en a deux. Seule
Maud n’en profite pas vraiment à cause du mareo (mal
de mer). L’équipage a l’œil sur les baleines
et le capitaine encore plus car il veut rattraper le coup de la pompe
et puis il adore la pêche. Et les baleines, sur tous les bateaux
du monde, provoquent la même excitation et la même effervescence.
Ca doit ressembler à celles des baleiniers, à l’époque
de la chasse, quand la vigie criait « Baleine ! Baleine ! ».
La Punta Cristobal, est très spectaculaire avec des mini-cratères
au bord de l’eau. Et puis c’est la délivrance
pour Maud car après, la mer est totalement plate. A moins
que ce ne soit le secret des marins équatoriens, des feuilles
de journal sur le ventre, qui ait eu raison du mareo.
Avant le déjeuner, petite baignade pour les enfants sur une
plage de coquillages. De la mer on ne voit rien, mais derrière
une langue de lave qui délimite une minuscule crique tournée
vers la terre, les coquillages, coraux et crabes concassés
restent prisonniers. Il faut choisir les zones de concassage fin
pour ne pas trop se piquer les pieds, ce que Garance comprend rapidement.
Les enfants se baignent, les adultes regardent les otaries, les tortues,
les poissons…
Après le déjeuner, sieste pour les enfants et marche
pour les parents. A peine sur l’annexe (ici ils disent « panga »),
une otarie sort la tête de l’eau en tenant un gros baliste
(poisson de corail plat) qu’elle ne peut pas avaler. Elle le
secoue hors de l’eau pour arriver à le mettre en morceaux,
entourée de pétrels à l’affût de
quelque relief. Nous regardons la scène plusieurs minutes,
moteur arrêté, à quelques mètres d’elle
sans la gêner, trop occupée à découper
son repas. Pas le temps d’aller jusqu’à la plage,
plusieurs centaines de fous à pieds bleus sont en train de
chasser la sardine. Ils sont tellement nombreux qu’on se demande
comment ils ne se percutent pas entre eux. Ils font un cercle, tout
le monde tourne dans le même sens, plonge avec le même
angle de tir, décolle dans le sens de la rotation, les nouveaux
se fondent dans le cercle… Une organisation d’enfer,
surtout pour les sardines en dessous. Le bombardement de fous est
impressionnant, la mer grouille de gerbes d’eau, les poissons
sont encerclés. Parfois la frénésie est telle
que les fous ne décollent que d’un mètre et replongent
directement, passant juste au dessus des autres fous, ils forment
une sorte de rouleau de fous en folie. Nous arrivons enfin à terre.
Le spectacle est magnifique. Des kilomètres de champs de lave
noire parsemés de cactus et parfois un trou d’eau avec
végétation verte et flamands roses. Sur une étendue
immense, la lave a fabriqué de petites ondulations dures,
des rocher découpés et tranchants, des billes poreuses
et légères, des terrains de jeu bombés entaillés
par de larges failles (on dirait des vieux terrains de basket de
Harlem), des couches homogènes de plusieurs mètres
d’épaisseur. Il faut venir voir et écouter ça.
Un calme impressionnant, pas un bruit sauf parfois le cri d’une
otarie au loin. Les lézards se sont bien adaptés, ils
ne marchent pas, ils sautent d’un bout de lave à l’autre.
Dans un trou d’eau, quatre requins à pointes blanches
paisibles, des perroquets respectables et deux poissons coffres taille
banque suisse. Pingouins qui tentent de copuler sous nos yeux, mais
le rocher est un peu glissant et cormoran aptère (sans aile,
espèce endémique NDRL de rien…) à côté de
notre panda pour finir en beauté.
Petit coup de Beagle pour aller voir une lagune. Au moment de descendre
dans la panga, le capitaine, toujours aux aguets, crie « ballena
! ». En plein dans le soleil orange, nous apercevons le souffle.
Une fois sur place, c’est de nouveau un rorqual commun, une
maman avec son baleineau. La maman est prudente, elle protège
son petit en jouant à cache-cache avec nous. Un jeu auquel
elle est de loin la plus forte. Arrivée dans la lagune soleil
couchant à l’ouest avec toutes les couleurs de l’arc
en ciel et lune levante à l’est, avec les mêmes
couleurs en plus doux. Pas un bruit, pas une vague, une otarie nous
suit dans la petite passe d’entrée. Les rochers sont
colonisés par les fous à pieds bleus, les pélicans,
les cormorans aptères, qui se découpent en noir sur
le coucher de soleil. Au fond de la lagune, une colonie de frégates
passe la nuit. Chut. Il y une frégate sur chaque branche d’arbre
ou de palétuvier qui peut supporter leur poids. Quelques unes
arrivent à peine et ont du mal à trouver une place.
Les mâles ont leur poche rouge gonflée dans l’espoir
de passer une bonne soirée. Les femelles ont l’air plutôt
blasées, comme toujours. Garance est tellement médusée
qu’elle parle à voix basse, personne ne fait un bruit, à peine
celui des rames dans l’eau et le noir de la nuit qui devient
de plus en plus sombre.
Nous remettons le moteur en route vers le bateau. Une journée
qui rappelle celle des rocheuses. D’ailleurs, tout le monde
dort à 21H00.
La phrase du
jour : "C’est
laquelle l’étoile filante ?" Félix.
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Vendredi
07 novembre 2003 : ISABELA, Urvina Bay et Caleta Tagus.
Un peu de géologie.
GMTFr : -7H 0° sud 91° ouest météo : beau,
force 3, mer belle
Urvina
Bay avait une autre forme avant 1956, date à laquelle toute
une partie de la baie s’est soulevée pour sortir de
l’eau. Cela a du être spectaculaire sur le moment, ça
l’est forcement moins à l’arrêt aujourd’hui.
Restes de coquillages marins, nos premiers iguanes terrestres, en
liberté au bord de leur terriers, une tortue, bonne chaleur.
Incroyable l’écart de température dès
qu’on quitte le bord de mer de plus de 50 mètres, un
autre continent. Plage, baignade et château de sable gris-noir.
Chris part en expédition à 300 mètres, le long
de la côte et des piquets balises. Colonies de crabes rouges
ou bleus, iguanes marins, demoiselles (poissons marron à queue
orange) qui se disputent les abris dans un trou d’eau un peu
surpeuplé, gobies, ils sont partout ceux-là, gros (de
bourgogne) escargots de mer. Belles vagues avec écume blanche
sur les rochers noirs. Dans un coin tranquille, bercée par
les remous, une otarie fait la sieste dans 50 centimètres
d’eau. Un grand plaisir pour elle et pour Chris. Yeux fermés,
elle se laisse couler doucement en faisant des bulles avec le nez
puis remonte à la surface prendre un peu d’air. Sans
aucun effort apparent, elle reste bien perpendiculaire à la
vague et ondule. Le meilleur hamac du monde si on est équipé pour.
Caleta Targus. Autre ambiance. Les otaries encombrent la grande montée.
La colonie d’Américains descendus de leur paquebot par
vagues de douze aussi. Heureusement, nous ne faisons que les croiser,
mais c’est déjà beaucoup. Tous très polis
selon leurs critères propres, ils nous envoient consciencieusement
un « Hello !» ne laissant aucune part au doute et auquel
nous répondons rigoureusement par un « Ola ! ».
Est-ce que nous dirions « Bonjour » (en français) à chaque
touriste croisé en Inde ? Belle vue sur le lac avec la baie
derrière et le Beagle au milieu. De plus haut encore, superbe
vue sur le nord de l’île, un immense champ de lave, un
désert, dominé par deux volcans. De là on peut
voir tous les volcans d’Isabela. Pendant ce temps un couple
d’otaries joue avec leur petit au bord du bateau au milieu
des tortues qui ont choisi ce spot depuis le départ des pirates
pour organiser de petites concentrations amicales de tortues.
Nous traversons le canal au ralenti en direction de Fernandina, à la
recherche de baleines. Seuls quelques raies nous montrent leurs ailes
et deux ou trois bonites sautent hors de l’eau. A notre nouveau
mouillage, les tortues et les otaries nous attendent déjà.
Une journée banale quoi.
La phrase du
jour : "Je
ne peux pas tout faire avec toi Papa, tu comprends bien qu’il
y a Maud et maman quand même" Julia.