Mardi
09 mars 2004 : tour de l’île en voiture.
GMTFr : -11H 18° sud 150° ouest météo : soleil
quelques nuages
Le problème des journées exceptionnelles,
c’est qu ‘elles sont exceptionnelles. Les lendemain rarement.
Aujourd’hui, c’est un lendemain. Départ un peu
tard en voiture, Garance en a profité pour se rendormir jusqu’à la
dernière minute. Huit dans une Ford Fiesta, ce n’est
pas notre record. Tour de l’île poussif donc. Démarrage
difficile, passage à la banque obligatoire, bifurcation par
un chemin de traverse non goudronné, montée au belvédère
non compulsive sauf dans les guides avec attaque de moustiques en
escadres, sites archéologiques by-passés, reste la
ferme agricole. En voyage on fait avec enthousiasme des choses qu’on
ne ferait jamais chez soi alors qu’elles existent en beaucoup
mieux. L’appel de l’inconnu, la force du marketing. Quand
il n’y a rien quelque part, la moindre aspérité prend
des allures de mont Blanc, figure en numéro un des choses à faire.
A la ferme agricole, débrouille toi tout seul. La visite est
gratuite, il ne manquerait plus qu’elle soit payante… Le
début du parcours c’est entre les toilettes et le bâtiment
administratif. Faut suivre les coups de pinceaux, on peut choisir
sa couleur pour faire pas trop long. Nous sommes là pour la
vanille. Quelques beaux albizias, des petits cochons roses qui puent,
des grands avocatiers, un champ de papayers, des colonies de fourmis
rouges partout qui s’attaquent aux nombreux fruits tombés
par terre, un champ d’ananas, des citrons, quelques fleurs
tropicales (on dirait qu’elles sont en plastic, aucune odeur),
des grosses truies dans la boue et il est temps d’aller chercher
la voiture. C’était la sortie sciences naturelles en
milieu tropical de l’école. Un investissement en fait.
Il est trop tard pour aller manger, tout est fermé. Achat
pic-nique, recherche de la plage du Sofitel, c’est face à Tahiti.
L’eau du lagon est un peu trouble, les tas de poubelles soigneusement
rangées tous les vingt mètres, il est trois heures,
enfants et parents déjeunent. Vite, à la voiture. Vite,
dans la voiture. Les moustiques sont furieux ici. Il y en a une trentaine
dans la voiture. Un spot à retenir. Finalisation du tour de
l’île dans une belle lumière. Nous n’irons
pas au Tiki village, artisanat-spectacle-dîner, personne n’a
compris le concept, tout le monde a été effrayé par
le prix. Retour à l’hôtel.
Ca nous fait un tour de l’île de plus. En Polynésie
mieux vaut le tour du lagon.
La
phrase du jour : « Ousurment » (heureusement). Félix.
Mercredi
10 mars 2004 : blue lagoon à Moorea.
GMTFr : -11H 18° sud 150° ouest météo : grand
beau
Le problème des journées exceptionnelles,
c’est qu’elles sont exceptionnelles. Les répétitions
rarement. Et pourtant, les exceptions existent. Départ matinal
pour le lagon avec nos amis de Mooreaboattours, Heifara et Nani,
ils ont amené Leihala. Direction les raies. Il n’y a
pas de vent aujourd’hui, l’eau pure n’est pas troublée
par les petites risées de vent comme deux jours auparavant.
On voit les raies du bateau comme à travers la vitre d’un
aquarium. C’est parfait pour les images. Il n’y a pas
la surprise d’une première mais le plaisir d’un
début d’habitude. Moins de raies, pas de requins, beaucoup
de photos les pieds dans l’eau, l’appareil au sec, ou
presque. L’eau lisse permet de distinguer le moindre détail
de nos amies rondes depuis la surface, pour ceux qui ont mis plus
de temps à se rassurer, de les voir venir de loin et de se
préparer psychologiquement à l’opposition. Ce
n’est pas du rugby, mais c’est quand même un sport
de contact. L’équipage est ravi.
Plus loin c’est les statues et Jojo le barracuda absent il
y a deux jours. L’ancre pas encore posée au fond, le
voilà ! Où ? Là ! Enorme. Dans un mètre
cinquante d’eau claire. On dirait une grosse canalisation pointue
en aluminium. Il nous fixe de bas en haut. Il a l’air calme,
pas beaucoup de candidats pour se mettre à l’eau avant
Heifara cependant. Mais le mystère des formes, des légendes
et du marketing des films gore Américains étant ce
qu’ils sont, un barra d’un mètre quatre-vingt
impressionne moins qu’un pointes noires d’un mètre,
sans aucun respect de la hiérarchie de la mer dont le premier
critère est la taille. Dans l’eau, le barra s’approche
vraiment près. L’œil est moins vide que celui du
requin, la bouche en pointe à l’avant bien visible ainsi
que les dents quand il desserre les mâchoires. Il s’appelle
Jojo, c’est surtout un barra de qui peut arracher un bras en
oubliant qu’il aime bien les plongeurs. Pourvu qu’il
ne l’oublie pas. C’est ce que l’on se dit quand
il approche doucement de face en fixant le fond du masque. Et puis,
c’est comme tout. L’homme s’habitue. Au bout de
quelques minutes on est apprivoisé, un peu fasciné par
la bête. La tête est quand même énorme.
A se demander si une flèche tahitienne pourrait vraiment traverser
un crâne aussi solide chez un autre individu moins sociable.
Heifara cache des bouts de harengs derrière lui, jamais une
main ne dépasse. Jojo se positionne à trois-quatre
mètres, de face et l’observe. Heifara agite le poisson
au dessus de sa tête, Jojo démarre et accélère,
gobe la nourriture et ralentit, aucun effort inutile et se laisse
caresser le ventre ou attraper par la queue gentiment. Spectaculaire.
Pas très rapide le Jojo, mais c’est pour attraper un
poisson mort, alors pas de quoi battre des records non plus. Chris
se risque à toucher la queue. Très cartilagineuse.
Les candidats se succèdent près de Jojo. Julia très
calme sur le dos de Chris, Maud seule mais sans lâcher l’échelle
du bateau, les Brouchettes selon l’inspiration instantanée
de chacune. Vraiment très impressionnant, pas un bruit, aucun
effort apparent, l’œil sur tout ce qui bouge, un très
gros morceau le Jojo. Respect, même si le feeding n’est
pas une activité totalement éthique. Mais il faut plus
que quelques harengs de temps en temps pour nourrir la bête,
qui reste basiquement sauvage et surtout non dépendante de
ces quelques gourmandises. Car si tous les catamarans de touristes
s’arrêtent chez les raies, aucun ne prend le risque de
laisser croquer un touriste par un barra pareil. On parle même
de Polynésiens qui amènent leurs amis plonger ici sans
jamais se mettre à l’eau. Le barra passe à moins
d’un mètre sous nous. C’est le bon moment que
choisit Félix pour quitter les épaules paternelles,
faire une petite apnée, se diriger rapidement vers la queue
du barra et la toucher avant de remonter tranquillement vers la surface.
Quatre ans ! Jojo n’a pas bronché. Félix est
content de son coup mais sans plus, Heifara et Chris font pareil.
Les tournées Julia puis Félix ne finiraient jamais
si les dauphins ne nous appelaient depuis la passe. Salut animal.
Le temps de quitter notre ami, les dauphins ont disparu. Nous sortons
du lagon, deux palanquées de plongeurs bouteilles squattent
de nouveaux corps morts à requins. Après l’émotion
d’il y a quelques minutes, personne ne songe à poser
réclamation pour si peu. Nous allons vers une autre passe.
L’eau est très claire, l’absence totale de vent
permet de voir les fonds à vingt mètres depuis le bateau.
C’est le moment où les dauphins font leur apparition.
Toujours les longs becs, spiners en anglais car ce sont les seuls à faire
naturellement des sauts avec vrille. Les bébés sont
nombreux au sein du groupe, ils jouent sur le dos en faisant claquer
leur queue sur l’eau. Ils se déplacent très lentement,
s’approchent parfois, mais surtout, avec la surface de l’eau
très claire et la surface parfaitement lisse, on les voit
parfaitement jusqu’à quinze ou vingt mètres de
profondeur évoluer en maîtres plongeurs. Des canards
de rêve, une fluidité absolue, une douceur extraordinaire,
ils volent autant qu’ils nagent, calmes dans l’eau calme.
Absolument magique.
Dernier stop dans le lagon entre les deux motus, pour profiter une
dernière fois des poissons de coraux. Une raie vient jouer
aussi, attirée par le hareng que Julia tient dans sa main
entourée de perroquets, de demoiselles et de chirurgiens.
Là, personne n’est impressionné. Déjeuner à quelques
mètres de là sur l’îlot, retour à la
pension, transfert. Au revoir le lagon, les Mahi-Mahi de Fakarava,
les pointes noires partout, les raies et le barra de Moorea.
Le vol régulier le plus court de l’histoire de l’aviation
c’est Moorea-Tahiti. Sept minutes, en comptant atterrissage
et décollage. C’est le pilote qui récupère
les cartes d’embarquement à la porte unique de l’aéroport.
Soirée danse au Beachcomber où nous avons nos habitudes
maintenant. JFG ont Richard, le fils de Laurent, comme nouvel ami,
un grand de neuf ans, tout le petit monde se couche à onze
heures.
Annie et Lili « rentrent » demain en France, convocation
vers 6h00 du matin à l’aéroport.
La phrase du jour : «J’ai
fait une petite apnée très vite et je lui touché la queue.» Félix.
PHOTOS / CHOUPIE
LE MATIN / PHRASES DU JOUR / IMAGES
DE POLYNESIE / BONNES ADRESSES