Journal de bord
AUSTRALIE
KIMBERLEY (DERNIERE FRONTIERE)
Mai 2004

A Broome Samedi 15 mai 2004 : repos.
GMTFr : +6H00 18° sud 122° est météo : couvert
Journée off. Le fait saillant de la journée est le dîner, bon et piquant, deux choses totalement inattendues à Broome, chez l’Indienne de China Town, au Sri Spicy Curry, entre le fish and chips et le supermarché, endroit le plus animé de la ville un samedi soir.

La phrase du jour  : « Maman son pain perdu il est meilleur ! » Julia.

Nous à BroomeDimanche 16 mai 2004 : sable.
GMTFr : +6H00 18° sud 122° est météo : pluie tropicale nocturne
Julia entame sa dernière leçon de français de l’année, elle va enfin savoir pourquoi « ferment » et « ferment » veulent dire « le contraire d’ouvrir » et « levain » (expliquer levain) et se prononcent différemment (dont le « e », placé devant deux « m », se prononce « a », mais pas toujours…). Il reste encore un peu de boulot. Pour les autres, la journée commence plus ou moins bien, selon les points de vue, avec le pic-nique, venté donc sableux, sur la plage de Cable Beach.

Plage de sable gris de l’océan Indien, à mi-chemin entre La Jolla, San Diego, Pacifique et, Moliets, Landes, Atlantique. Ici aussi, on se demande pourquoi les gens viennent se faire griller au soleil précisément là, avant de se tremper les fesses dans une eau aux filaments de méduses récalcitrants ou au plancton urticant qui pique sous le maillot, on dirait des milliers de petites aiguilles d’oursins. Petits rouleaux et eau chaude, tout le monde revient avec les fesses qui piquent. Pour l’information du lecteur, cette même plage a été fermée deux jours plus tard, car trois personnes sont parties en réanimation pour cause de piqûres de « stingers », nouvelle race de méduses, mortelle comme les méduses boites, apparue il y peu…

Chris emmène toute la troupe faire un tour de 4X4 au bout de la plage, le must local. On descend sur le sable, on traverse à droite la langue de rochers plats et on y va. On ne peut pas se tromper, la dune à droite, la mer à marée basse à gauche, les 4X4 arrêtés le long du parcours, pêche, détente des chiens, surf à parachute (le dernier top du in), farniente en attendant le coucher du soleil, c’est selon le maître de chaque 4X4. Plus on s’éloigne, moins il y de gens. Après plusieurs kilomètres, plus grand monde. Nous nous arrêtons dans l’humide, entre vagues et sable sec, sur une bande de sable recouverte d’une fine pellicule d’eau qui en fait un miroir gris bleuté, large de plusieurs centaines de mètres, long comme la plage, dont la fin disparaît au loin. Avec ce reflet de lumière, les ombres et les photos sont magiques. Nous continuons, mais une faille nous oblige à ralentir, à tourner vers la dune, à faire demi-tour, la voiture ralentit dangereusement, Chris accélère, la voiture ralentit encore, plouf, ensablés. Crabot, marche avant, marche arrière, rien n’y fait, il faut creuser. Toute la troupe s’y met, notre équipement est celui des vrais pro, pas de pelle, pas de plaque de désensablement, pas de treuil, pas de chaîne ou de corde, mais tout de même, une pelle en plastic vert grand format et deux seaux de plage. Déblayage des roues, effort mesuré, la voiture avance de quelques mètres et retombe dans le sable. Effort non mesuré, roues dégonflées, un papi australien qui marchait par là donne des conseils peu concluants, pousse, ce qui est louable, tire, ce qui est idiot et dangereux et voilà la voiture enfoncée comme jamais. Le sable et l’eau, rien de pire, bien plus fort et obstinés que les hommes. Julia et Félix ne ménagent pas leur peine, Garance aide tout ce qu’elle peut avec son petit seau, sans que nous leur ayons demandé quoi que ce soit. Tout le monde en bon ordre sur le pont en pleine tempête, avec bon esprit, nous n’aurons pas fait le tour du monde pour rien, cette information vaut bien de s’ensabler par un dimanche après-midi ensoleillé. La pelle verte est perdue, ensevelie quelque part, il est clair que nous ne sortirons pas de là sans aide. La marée remonte, la dune est à cent mètres, aucun danger pour la famille, à part pour le Patrol, auquel nous sommes attachés, mais pas assez pour couler avec lui, et ce n’est pas parce que l’eau monte qu’un chauffeur devient capitaine. Le papi part chercher de l’aide en Subaru 4X4 et revient avec du solide. Trevor.

Trevor. Look de ZZ Top assagi, barbe longue, lunettes fumées, débardeur, chaîne autour du coup, short et tatoos, arrive avec son engin. Mi-4X4, mi-engin de chantier home-made, un Patrol, comme nous, mais ils n’ont de commun que le nom. Le sien, indestructible, roues une fois et demi hautes comme les nôtres, treuil, quatre bouchons spéciaux pour dégonfler les pneus à la bonne pression pour le sable mou sans perdre de temps, atelier de mécanique dans les coffres des côtés fermés par des cadenas anti-poussière, bateau en aluminium sur le toit, bandes spéciales pour tirer et être tiré, pick-up transformé en camping-car avec douche chaude à l’intérieur et surtout, 6,5 litres turbo diesel préparés par le Gordini local et technique du désensablage à toute épreuve du propriétaire. Sa femme, très sympa elle aussi, accompagne avec philosophie et humour ses deux engins, canette de bière enserrée dans la gaine de néoprène isotherme dont aucun Australien ne saurait se passer, il aurait l’impression de sortir tout nu dans la rue. Avec Trevor, il n’y a pas de question, il n’y a que des réponses. Il nous dame une piste pour que nous puissions sortir, attache notre Patrol d’amateur au sien de professionnel (il travaille dans l’irrigation , rien à voir, mais ça ne fait rien), « quand je pars, à un moment je passe le bras par la fenêtre, c’est le moment où tu dois accélérer, ça va te donner un jerk (tiens ! un mot qu’on connaît pour des raisons périphériques) et tu suis mes traces. » Ca se passe exactement comme a dit Trevor. Sauf qu’il assure le service après-vente, en plus. Il a dérivé le compresseur de sa climatisation, pour pouvoir regonfler ses pneus et ceux des gens qu’il est manifestement habitué à sauver du naufrage ou du désespoir. Remerciements, échange d’adresses, c’est sûr vous serez nos stars sur internet bientôt. Nous rentrons sagement, en ne laissant pas Trevor prendre trop d’avance, au cas où...

Pas mal comme promenade digestive de dimanche après-midi. Un seul regret, plus de batterie pour prendre une bonne photo de nos amis de sand rescue. Comme quoi, l’aventure est au coin de la plage.

La phrase du jour  : « Celui-là (Trevor), il est carrément bien équipé, il a tout dans son 4X4, même des bottes, alors je te dis pas ! » Julia.

 

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