Journal de bord
Novembre 2003 / Les Iles Galapagos

GMTFr = heure locale au méridien de Clermont-Ferrand.
-7H => 12H (midi) à Clermont-Ferrand = 05 Heures du matin à Quito

Lundi 10 novembre 2003 : RABIDA, plage nord, SOMBRERO CHINO.
Partager la plage avec les otaries.
GMTFr : -7H 0° sud 90° ouest météo : garua puis beau, force 3 à 5, mer belle
Arrivée au petit matin à Rabida, des dauphins nous accueillent avec de grands bonds au loin. Le capitaine Osvaldo rentre fièrement de la pêche avant la fin du petit déjeuner avec deux magnifiques thons à ailes jaunes de six à huit kilos chacun. Vite pêchés, vite vidés, la première tête part à l’eau. Avant d’avoir coulé de plus de deux mètres elle est engloutie d’une bouchée apéricube par un requin des Galápagos de deux mètres cinquante surgi de nulle part. Ca rappelle que la nature est belle mais sauvage ici. La deuxième tête subit le même sort, car trop grosse pour être happée au passage par les pélicans. Les requins sont maintenant deux, de la même taille. De quoi refroidir les ardeurs de baignade matinale… L’équipage tente de jeter quelques morceaux de thon aux requins pour les faire rester mais tout est attrapé au passage par les pélicans et les frégates, malgré le jet d’eau qui tente de les dissuader. Un gros morceau finit par traverser le rideau des oiseaux et deux poissons coffres l’attaquent. Mauvaise idée car un requin déboule et ne fait qu’un bouchée du tout. Tout le monde est très attentif lors du cérémonial des gilets de sauvetage et de la descente dans la panga.
La plage est rouge brique, encore une tentation du diable pour la collection de sable. Du haut du chemin on surplombe la petite falaise de l’autre côté de l’île. On croirait des requins mais ce sont des diabla qui nous montrent leur nageoire hors de l’eau. La colonie d’otarie est très paisible, un requin à pointes blanches longe la plage, une chasse de thons fait bouillonner l’eau, rien que du « regular » pour la zone. Nous avons manqué les nichées de pélicans de quelques semaines, il ne reste plus que les cadavres des jeunes, morts de faim. C’est normal nous dit Fabio et les pélicans n’ont pas vraiment l’air en voie de disparition.
De délicieux sashimis de thon nous attendent au retour, avec sauce soja et wasabi, comme au japonais, en mieux. Merci Osvaldo pour la pêche et Fernando pour la cuisine. Petit coup de mer jusqu’au Sombrero Chino, son lagon, sa plage de sable blanc, ses otaries joueuses, sa lave bien découpée et les vagues du Pacifique qui explosent dessus. A visiter sous le soleil selon Fabio et justement il y du soleil. Toute la famille en profite pour se baigner dans l’eau émeraude au milieu des otaries, sous le regard réprobateur du « macho » (grand mâle chef de tribu, l’otarie, pas Chris !). Sur le chemin du retour, un héron des laves qui fait son nid dans une grotte de lave et deux pingouins qui se reposent, juste pour dire.
A un demi mile, nous passons par les Membridge, un cratère à moitié effondré entouré des petites îles autour. A l’intérieur du cratère, une lagune et des flamands roses qu’on peut voir depuis le toit du Beagle. Un des plus beaux coins depuis le départ, avec une lumière pure et une mer bleu Mistral. La navigation vers Santa Cruz est superbe avec un peu de vent dans le canal entre les îles. Une raie manta fait un looping dans le vent au dessus des vagues pour fêter tout ça, les fous à pieds bleus sont pris pour des poissons volants par l‘équipage tellement ils remuent et plongent. Ce soir cocktail avec équipage en grand habit de parade réglementaire de la marine (bermuda blanc, polo Beagle blanc). Demain David et Sylviane repartent en Angleterre, nous aurons le dueno Augusto Cruz comme capitaine. Fabio part aussi. D’autres passagers montent, une nouvelle croisière commence.
La phrase du jour : "Nos mamies elles ont connu Jésus Christ ?". "Non". "Hein ! Même pas mamie Paule ?" Julia.

Mardi 11 novembre 2003 : SANTA CRUZ, Caleta Tortuga Negra, SEYMOUR NORTE.
Encore des immanquables.
GMTFr : -7H 0° sud 90° ouest météo : beau puis couvert, force 1 à 2, mer belle
Départ très matinal, avant le petit déjeuner, pour la lagune et les palétuviers. Tortues, raies, couple de hérons plutôt solitaires habituellement, oiseaux… Toujours très zen, Fabio nous amène, moteur arrêté, à travers un tunnel de palétuviers, tout au fond de la lagune. Sur une pierre, dans cinquante centimètres d’eau, une trentaine de requins pointes blanches portion (un mètre cinquante, tous calibrés) se reposent. La coque de la panga les gène et ils se déplacent lentement pour lui laisser un passage au milieu d’eux pendant qu’une énorme tortue fait le tour du groupe. Une fois tous dispersés nous ressortons dans la lagune, une des plus grandes de l’archipel. Sur le chemin de la sortie, une énorme raie pastenague noire, tellement grande que notre guide croit un instant que c’est un trou. Quelques mètres plus loin, un vol d’une douzaine de raies aigle tachetées, frôle la surface. Il est l’heure de rentrer pour le petit déjeuner.
Le dueno monte à bord et nous disons au revoir à capitaine Osvaldo et Guide Fabio avec un certain pincement au cœur. C’était parfait et très convivial avec eux et notre couple d’Anglais. Espérons que ce sera aussi bien avec notre nouveau groupe. Fausto, le nouveau guide, arrive avec les Américains et les Anglais. En attendant nous faisons le plein de gasoil, mais comme Baltra est une base militaire, nous devons rester dans la cale pendant l’opération secret défense.
L’ambiance change, Augusto n’est pas bavard, Fausto l’est pour deux, mais les spots sont toujours aussi extraordinaires. L’excursion sur Seymour Norte longe une plage de galets gros comme des ballons de football. Pas vraiment confortable mais super efficace pour casser les vagues. Les otaries sont un peu moins sauvages que dans l’ouest et des jeunes viennent nous sentir les chaussures et les mollets. Nous voyons nos premières mouettes à queue d’aronde, certaines avec des petits sortis de l’œuf. Un petit décalage entre nous, déjà bien dans l’ambiance et les nouveaux qui photographient tout. Il faut dire qu’en descendant de l’avion, le spectacle est plutôt dépaysant. Enorme colonie de grandes frégates et de frégates magnifiques, avec des nombreux petits de quelques jours à quelques mois dans les nids. Ravage de fientes dans tout le périmètre alentours où plus rien ne pousse. Pour aller sur le magnifique petit îlot Mosquera, il aurait fallu l’équipe de la semaine dernière… Une nouvelle bonne raison pour revenir ici un jour.
Premier dîner « en ville » avec la tablée de grands voyageurs anglo-saxons. Des infos sur certaines de nos prochaines destinations, des idées pour de prochains voyages. Le décor est planté. Par ordre d’entrée en scène. Nous. Les Français. Avec trois enfants en plus. Alison, l’Anglaise baroudeuse aux cheveux courts bouclés noirs et à l’œil vif. Son âge ne l’empêche pas de chevaucher à travers les contrées les plus reculées. Elle dit peu de choses mais tout indique qu’elle n’est pas sourde. N. est une végétarienne américaine, blonde à couettes, qui a un centre genre SPA et vit à Salt lake City. Mais elle n’est pas de Salt Lake City, attention. Elle a amené T, avec elle. T ne parle pas mais porte un bandana. N a convaincu T d’être végétarien. Tous les deux boivent du coca. N, ne peut jamais se lever assez tôt pour le petit déjeuner. Quand elle ne comprend pas elle dit « what’s that ? », Alison, elle, dit « excuse me ». Les autres Anglais, Alan et Kate (Catheryn), ont l’air très sympas et aussi futés l’un que l’autre. Ils adorent rigoler. Alan prononcent très bien, tout le monde comprend, sauf parfois N. Kate n’est pas rassurée en mer, alors la nuit elle chante des cantiques pour sauver le bateau du naufrage. Ca empêche, « e-ven-tua-ly », Alan de dormir, mais il se lève le premier après Chris. Kate ne manque jamais un petit déjeuner, quitte à rester ensuite à bord pour faire de la broderie anglaise. Personne n’est parfait. Encore une Anglaise, Lorna, biologiste, passionnée véritable de la nature. Miss je me casse la figure partout, ne manque jamais un snorkling. Elle est mariée avec le frère aîné de Mr Bean. Bean Senior est plus British que son frère cadet. Il fait beaucoup de ce qui, pour un continental, est considéré comme une affreuse grimace et pour un Anglais comme une pratique insulaire commune. Tous les Beans de la famille ont autant d’humour, le plus difficile c’est de comprendre la chute. Les derniers protagonistes sont des Américains de Santa Barbara. Ils jouent au tennis tous les jours, ça va leur manquer pendant une semaine. Lui est grand et finit tous les plats, sa femme dit que c’est frugal à la maison. Augusto ne se montre pas mais surveille tout. La présence de ce personnage de roman, né sur l’île de Floreana, quatre-vingt habitants, marié à une Anglaise de la plus haute noblesse, pèse d’un énorme poids sur le bateau. Le dueno, est extrêmement sympa mais n’a pas une envie folle de discuter avec les Américains de leurs listes d’allergies et de choses qu’ils ne peuvent pas manger par conviction télévisuelle. Il nous fait coucher dans le canal entre Baltra et Santa Cruz, un coin très tranquille. Comme lui.
La phrase du jour : "Si on met l’ancre ici, on ne sera pas bien abrités par le Cap Horn" Félix.


Retour

Suite