 |
Vendredi
14 novembre 2003 : SANTA CRUZ, Puerto Aroya
Ici c’est pas comme chez nous.
GMTFr : -7H 0° sud 90° ouest météo : beau
Puerto
Aroya. Nous sommes très contents d’être « à la
maison ». Louis, le marin chef, dans son immuable tenue,
short et tee-shirt Beagle réglementaires, casquette Timberland,
Ray Ban sur les yeux, sourire aux lèvres, nous dépose
directement au Red Mangrove. Lina n’est pas arrivée.
Renseignements pris, elle a été licenciée,
ainsi que Soledad, plus personne de connu. Les raisons ne sont
pas très claires, des problèmes avec certains clients
(les amis du dueno qui ne payent pas la chambre ?), de mauvaises
ondes… Polo, le dueno , vient nous dire bonjour. Très
mauvais feeling. Du coup, notre petit chez nous, où nous
comptions passer la journée tranquillement en famille avec
nos amis disparaît. Ca fait un drôle d’effet.
Une chose est certaine, sans Lina et Gustavo, impossible de mettre
le Red Mangrove dans nos adresses recommandées. Les enfants
vont faire l’école dans un bar ami et Choupie et Chris
ont matinée téléphone et internet café avec
liaison satellite. Il est question de banque, de parents, d’amis
et de croisière autour du Cap Horn et en Antarctique. C’est
incroyable le boulot que ça donne de ne rien faire, que
le tour du monde.
L’après-midi, pendant la sieste des enfants sur le
bateau, rebelote jusqu’à la tombée de la nuit.
Il est temps de chercher Lina et Gustavo. Soledad, rencontrée
dans la rue, a déjà un nouveau boulot, nourrie logée
chez une amie, elle est très contente, plus qu’à l’hôtel.
Le taxi nous amène directement chez nos amis, qu’il
connaît (tout le monde les connaît). Personne. Il nous
fait faire le tour de la ville et de tous les restaurants qu’ils
fréquentent habituellement tout en lançant un avis
de recherche local sur la radio des taxis. Personne ne les a vus.
C’est dommage, ils vont penser que nous ne sommes pas passés
les voir et sans l’hôtel, la connexion sera difficile.
Retour à l’internet café. A peine arrivés,
nos amis déboulent en taxi. Embrassades, organisation de
la soirée, nous allons tous manger à la Media Luna,
le restaurant d’Eduardo et Evelyn, les Chilo-Equatoriano-Américains
avec lesquels nous avons passé la soirée musicale
il y a quelques nuits de ça. Lina est déjà associée
avec eux. Tout va changer dans le restau, avec une carte langouste-poissons
et des approvisionnements de première grâce à Gustavo
qui en fait le négoce. Et avec Lina bientôt aux fourneaux,
c’est une adresse qu’on peut déjà noter.
Eduardo nous recommande le « mercado central » de Santiago
pour aller manger des fruits de mer dans un bâtiment fabriqué par
Eiffel. Nous penserons à tous nos amis une fois là-bas
et bien contents de savoir que Lina va faire prospérer le
fonds de commerce avec des associés charmants pendant que
le grand Gustavo continuera à faire son commerce import-export
de produits de la mer. Seul moment difficile de la soirée,
l’échange d’adresses. Ici, tout le monde se
connaît, pas besoin de numéros ni de noms de rues.
Ca complique pour écrire aux amis. Finalement, nous partons
avec l’adresse de l’entreprise de Gustavo, l’adresse
email d’une amie de Lina et c’est Eduardo qui conserve
toutes nos coordonnées. Salut les amis, si nous ne revenons
pas de si tôt, nous vous enverrons d’autres amis. Contents
que vous soyez tous recasés. Ici c’est pas comme chez
nous.
La phrase du
jour : "Garance
tu la portes à la montée et moi à l’aller-retour" Félix.
 |
Samedi
15 novembre 2003 : FLOREANA, Punta Cormoran, La Corona del
Diablo, Post Office Bay, Puerto Velasco Ibarra.
Les dauphins.
GMTFr : -7H 0° sud 90° ouest météo : beau,
force 2 à 4-5, mer belle à agitée
Punta
Cormoran est célèbre dans l’archipel pour sa
lagune à flamands roses. A la base, il vaut mieux aimer les
flamands roses. Mais bon, on ne va pas faire la fine bouche. Et puis
on se laisse entraîner, la lagune est belle, les flamands roses
nombreux et bien qu’habituellement farouches, ils se laissent
voir de près aujourd’hui. On aperçoit même
un gros œuf sur la petite plage en face, là où ils
y a concentration. Pas de quoi passer la journée quand même.
Nous continuons la traversée de l’île vers la
plage côté grand large. Une des plus belles, avec son
sable blanc, tous les tons de turquoise et d’émeraude,
un beau soleil, les petits rouleaux du large et la vue sur les îles
au loin. Les tortues l’ont bien compris, elle ont envahi la
plage avec leurs nids. Les raies dorées aussi, elles sont
une trentaine entre l’écume et le sable, à prendre
le soleil dans moins de vingt centimètres d’eau. Le
plus difficile, c’est de ne pas leur marcher dessus. D’ailleurs,
Chris marche sur une raie, pas de coup d’aiguillon en retour.
Quelques vagues plus tard, une autre vient lui renifler les pieds
volontairement, en copine.
Notre étape suivante, c’est du snorkling en panga à la
Corona del Diablo, le meilleur spot de la semaine selon Fausto. Choupie
hésite un moment et se laisse tenter. La panga nous laisse
en amont de la couronne en plein courant. Il paraît qu’il
y a des requins, mais pas méchants. Toujours le même
genre de poissons et de fonds, un mix entre les poissons coralliens,
toujours grand format et des fonds et des couleurs entre la mer Méditerranée
et la Bretagne. Un sacré courant, en quelques minutes nous
sommes de l’autre côté de la couronne. Une otarie
passe devant nous, à contre courant, pour elle ça n’est
pas vraiment un problème de nager dans ce sens, pour nous
c’est impossible. Fausto sort la tête de l’eau
et crie « il y a des dauphins, je les entends dans l’eau ».
C’est vrai, on les entend siffler. La panga arrive tout de
suite. Le plus dur c’est de remonter miss Lorna. Elle se casse
la figure sur le plat, alors grimper dans la panga avec les palmes
et sans l’échelle, c’est du sport. Pour elle et
pour nous. Les dauphins sont devant l’étrave du Beagle,
il y en a des dizaines, ça saute de partout. Sur le bateau,
tout le monde est sur le pont, les dauphins tout autour. Nous fonçons
dans le clapot avec notre Yamaha Enduro de 8 chevaux. Il a conquis
le monde l’Enduro Yamaha ! Nous n’allons pas vite mais
nous prenons une quantité faramineuse d’eau dans la
figure. Il règne une excitation énorme dans la panga.
Quelques dauphins nous entourent, plouf tous à l’eau.
Pas question de requins ou de courant. Tout ça c’est
oublié. Les dauphins restent autour de nous, ils discutent
ferme. Ils passent rapidement en jetant un coup d’œil
et disparaissent, d’autres arrivent ou reviennent. Plus rien.
Tous dans la panga, même Lorna. On rattrape le Beagle et les
dauphins, ils sont au moins une cinquantaine. Plouf. « Je vois
des dauphins partout ». Ils déboulent de tous les côtés,
nagent sous nous par rangs de trois, cinq, huit, pendant que d’autres
nous entourent en surface. Toute la compagnie vient jeter un coup
d’œil sur nous. Le spectacle ici, c’est les hommes,
pas les dauphins. Le grand bleu dessous, les dauphins qui prennent
la même couleur. Tout est bleu. L’excitation de tout
le monde est énorme, pour rester avec les dauphins, nous nageons
le plus vite possible dans le même sens qu’eux. Les hommes
c’est bien, mais le surf sur la vague d’étrave
c’est mieux. Plus de dauphins, nous remontons sur le Beagle
pour continuer à profiter du spectacle et essayer de prendre
un bout de vidéo. C’est Choupie qui est contente d’être
venue au snorkling. Un sacré souvenir.
Bahia Post Office, c’est juste sacrifier à une vieille
tradition. Leurs campagnes durant trop longtemps, les baleiniers
laissaient des lettres dans un vieux tonneau de rhum (vide). Ceux
qui rentraient apportaient en main propre aux destinataire, les messages
de ceux qui arrivaient. La tradition perdure. Rien n’est timbré dans
le tonneau. Tout le monde laisse une carte et tente d’en ramener
une. Chris emporte une carte pour Golfe-Juan. Si tout se passe bien
elle passera par le cap Horn et la rue du congrès à Nice.
Distribution prévue dans deux mois environ. On dit qu’une
carte postée ici est arrivée en Norvège avant
celle postée la veille à la poste de Puerto Aroya avec
un vrai timbre…
Puerto Velasco Ibarra, c’est la patrie d’Augusto, quand
l’île appartenait à ceux qui y habitaient, comme
sa famille sur les hauteurs de Floreana. Il règne ici une
ambiance de bout du monde. Difficile à décrire. Une
impression étrange de tranquillité et de folie partagée
par les quatre-vingt habitants de l’île. Tout est lourd,
figé. Première île habitée, île
toujours la moins peuplée. La boutique des Wittmer, la mamie,
une figure locale, aurait tué ses deux amants et son mari
peu après son arrivée avec les trois ici, est ouverte
en attendant la fin de la construction de l’hôtel de
luxe dont rêvait la grand-mère depuis son arrivée
sur l’île. Il y a environ soixante dix ans. Les Américains
trouvent des snickers (barre chocolat-caramel-cacahuetes), ils sont
ravis. Nous réussissons à nous perdre sur le seul chemin
du lieu alors qu’il n’y a pas de croisement. Un exploit.
Il faut dire que c’est Choupie et Maud qui font la navigation…Espérons
qu’Augusto nous en dira d’avantage sur son île
au sable noir. Cette nuit grosse navigation jusqu’à Santiago.
La phrase du
jour : "We
where there before it was famous" L’Américain
de Santa Monica, California, sur le livre d’or des Wittmer.